Tigidda
Un royaume, une capitale ... et la visite d'Ibn Battuta
L’effervescence qui traversa les tribus nomades sanhadjiennes Gdāla, Lamtūna et Masūfa des rivages atlantiques du Sahara à partir des années 1040, fut le début du mouvement qui allait prendre le nom d’al-murābiṭūn, les Almoravides (Cheikh 2023). Les Sanhadja sont un ensemble de tribus berbères, hommes voilés du désert, dont certains Touaregs sont les descendants les plus directs (Khelifa 2010). Ils furent les premiers à lever toutes les barrières politiques, religieuses, commerciales en établissant un empire allant du Sud du Sahara jusqu’à Al-Andalus. La conversion à l’islam des populations soudanaises, attribuée aux Almoravides par la tradition sunnite dominante, a consisté en fait à leur imposer un islam malékite orthodoxe (Botte 2011).
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Azelik-Takadda fut une importante cité commerciale, située à environ 130 km au nord-ouest d'Agadez. En surface, se rencontrent nombre de tessons de poteries et autres meules dormantes, mais le plus important sur ce site, demeure certainement les restes d'habitat composés de “bâtiments ouvrant sur une seule cour” et trois mosquées, dont deux possédant un minaret en partie en pierre. De plus, des cimetières d'époque islamique ont également été retrouvés tout autour du site (Bernus et Cressier 2011). Azelik, nom actuel du site de l’ancienne capitale du royaume de Tigidda, aussi appelée Takadda ou Tacâdda par les auteurs arabes et visitée en 1353 par le géographe arabe Ibn Battūta, était une halte caravanière dans le commerce transsaharien entre Boucle du Niger et Égypte, mais aussi un centre d'exploitation et de commercialisation du cuivre. Ce ne fut pas une terminaison d’un axe commercial, mais une halte, un passage obligé pour sa ressource en eau et pour le paiement des droits de traversée du royaume, assurant ainsi la protection des marchandises. Il ne devait pas y avoir non plus de rupture de charge à cette étape, car la ville n’était pas une ville suffisamment peuplée pour développer un marché important à approvisionner, tout au plus les caravanes devaient-elles se fragmenter pour poursuivre leur route vers Gao, le Bornou ou vers le sud, ou s’unir pour marcher vers le nord.
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Dans cet article, je m’intéresse aux Gobirawa qui, à une époque, ont passé par l’Ayar1. Il serait vain de croire que cette communauté n’ait qu’une seule origine. Comme beaucoup de confédérations Berbère, Touareg ou même Hausa, les Gobirawa que l’on connaît aujourd’hui en tant que peuple du Hausa Bakwaï (les sept États Hausa légitimes), sont le résultat de migrations qui viennent des quatre points cardinaux et qui englobent aussi des autochtones. La diversité des traditions orales ou des écrits, des cousinages ou des us, ne reflètent en fait que les alliances qui se sont faites et défaites, de grès ou de forces, tout au long de leur histoire, par métissage ou assimilation successifs entre populations désireuses ou obligés de s’unir pour poursuivre leur histoire. Comprendre ces diversités n’est pas chose aisée.
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Cet article tente de comprendre les éléments que rapporte Ibn Battûta de son périple en Ighazer, afin de participer à la vision du cadre géographique et humain qu’apporte son récit à cette région, issu des traductions faites par Defrémery et Sanguinetti au milieu du XIXè et de celle de Joseph Cuoq à la fin du XXè siècle (Defrémery and Sanguinetti 1858; Cuoq 1975). Il est donc à l’évidence ethno-géo-centré sur la ville de Tacaddâ et sa région. Néanmoins pour comprendre ce cadre géographique, les sources écrites arabes médiévales apporteront un peu plus de consistance à ce récit. Ces sources sont essentiellement issues du « Recueil des sources arabes concernant l’Afrique occidentale du VIIIè au XVIè siècle » de Joseph Cuoq.
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A partir du XVè siècle s’instaure un fort mouvement de lettrés et religieux venus de l’ouest, des Sanhadja de Walata, Tombouctou et Tademekka. Ce mouvement semble s’intensifier avec l’avènement de Sonni Ali Ber et l’empire Songhay à la fin de ce siècle. Ces personnages professent un islam plus rigoriste et puritain, dont Al Maghili en est un représentant qui passa par Takadda, devenue dès le XIVè siècle un important centre de diffusion spirituel. A la chute de Takadda, Anisaman va prendre le relais mais uniquement sur plan religieux, Agadez s’accaparant les pouvoirs politique et économique (Bernus et Cressier 1992), puis évinçant définitivement Anisaman au XVIIè siècle.
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On peut définir plusieurs périodes dans le développement de l’islam au Niger, qui se fondent bien entendu dans l’espace plus large que représente le Sahara. En premier lieu, du VIIIè siècle au XIè siècle une période où les berbères vont embrasser le rite Kharidjite et particulièrement sa version ibadite, qui s’adapte mieux au mode de vie et au caractère indépendantiste des nomades. Du XIè au XVIè siècle, une islamisation du Sahel et du Soudan portée par les grands empires soudanais, Ghana, Mali, Songhay et Kanem, où ce sont surtout les élites qui se convertissent sans abandonner les rites ancestraux toujours répandus dans les peuples. Au XIè siècle, le mouvement Almoravide marque aussi le déploiement du rite malékite, qui se traduira en Ighazer par le premier Sultanat de l’Ayar le royaume de Tigidda. La fin de ce royaume marque aussi la fin d’un islam élitiste et le cadre de cet article, à la charnière des XVè et XVIè siècle.
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