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    La Naissance du Sahara et de l'Ighazer

    Si le Sahara nous apparaît aujourd'hui comme une terre qui de tout temps a été désolée et inhospitalière, il n'en a pas été toujours ainsi dans la grande histoire de la dérive des continents. Avant que cette dernière ne soit arrivée à son stade actuel, le Sahara a connu de grandes évolutions sur des temps géologiques se comptant en millions d'années, et son aridité ne serait issue que de ces derniers millénaires, modelant ainsi le milieu et les peuplements humains, affirmant son caractère majestueux.

    Le désert du Sahara est le résultat des hautes pressions atmosphériques (anticyclone) au niveau du tropique du Cancer, qui entraînent la descente d'un air qui s'est élevé et asséché au niveau de l'équateur. A la redescente, cet air s'assèche encore et se réchauffe façonnant ainsi le milieu sec et chaud du Sahara. Ces hautes pressions sont notamment influencées par les 2 calottes glaciaires qui influent sur le positionnement des anticyclones et donc du Sahara, actuellement sur la partie Nord du continent africain (Rognon 1985).


    Une longue migration

    la dérive des continentsVers 600-700 millions d'années (Ma), le Sahara est dans l'hémisphère sud sous une calotte glaciaire. Vers 550 Ma, l’orogenèse (formation des montagnes) culmine et a été suivie d'un intervalle d'érosion prolongé et étendu, une grande partie du Sahara étant réduite par dénudation à une plaine de faible relief. Un nouveau soulèvement vers 450 Ma, a marqué au Sahara le début des glaciations de la fin de l'Ordovicien. Vers 430 Ma, le Sahara amorce sa remontée vers l'équateur et sera envahi par la mer au Silurien. Au dévonien (400 Ma), il émerge au dessus des eaux, le climat est humide et de grands fleuves se dessinent. Au Carbonifère (320 Ma), le Sahara se trouve en zone tropicale sèche qui formera les grès rouges qui aujourd’hui affleurent, mais toujours en milieu austral.

    Vers 300-250 Ma, une catastrophe (changement climatique, météorite ?), provoque la disparition de 95 % des espèces marines et 70 % des espèces terrestres de la Pangée. Ce phénomène a été mis en évidence dans la région d'Arlit, au nord de l'Ighazer, par des fossiles de crocodiliens, d'herbivores et autres reptiles. Cette zone était probablement un refuge pour nombre d'espèces, qui malgré l'extinction de certaines, a permis l'évolution d'autres mieux adaptées. Celles-ci sont a priori des espèces endémiques de cette région et qui diffèrent du reste du continent méridional et septentrional de la Pangée.

    orogeneseAu Trias (240 Ma), la dérive des continents se poursuit en direction de l'équateur, avec des environnements plus humides, c'est l'époque des dinosaures, crocodiles et autres tortues et la formation de la série des grès d'Agadez qui sépare l'Aïr de l'Ighazer. Au Jurassique (170 Ma), c'est la formation des argiles de l'Ighazer et des bois silicifiés qui serviront plus tard à la fabrication d’outils de l’époque préhistorique. La plaine de l'Ighazer est alors une forêt de gigantesques arbres parcourue par les dinosauriens. C'est aussi l'émergence des mammifères vers 150 Ma. Au Crétacé (100 Ma), le continent africain se sépare d'avec l'Amérique du sud, de nouveau immergé puis continental au début du tertiaire (66 Ma), c'est aussi l'extinction des dinosaures, et l’apparition des primates. Le Sahara est désormais proche de sa destination finale.

    Vers 35-40 Ma, commence l'évolution des Catarhiniens, un groupe de primates (Nantet 1998). Le climat devenant plus aride vers 23 Ma, les Catarhiniens se subdivisent alors en cercopithèques et hominoïdes qui rassemblent les chaînons qui mèneront aux hommes et aux primates actuels (Nantet 1998). A 15 Ma, sous l'influence d'une brusque détérioration du climat, une partie des pré-singes abandonnent la forêt pour la savane. Ils seront à l'origine de la bipédie vers 7-10 Ma, avec le groupe des hominoïdes, rassemblant les australopithèques et les hominidés (Aumassip 2004). Néanmoins, cette conception de l'émergence de la bipédie est de plus en plus discutée, elle aurait aussi pu débuter dans les arbres.

    En 2001, au Tchad, c'est la découverte du plus ancien hominidé connu de nos jours, Toumaï âgé de 7,3 millions d'années, ce qui fait de cette région du Sahara le berceau de l'humanité, en attendant de nouvelles découvertes (Brunet et al. 2002). Cet hominidé évoluait alors dans une savane arborée composée d'îlots forestiers et de prairies de hautes herbes, entremêlés de marécages et lacs. La faune piscicole était pourvue de poissons, crocodiles, tortues et autres pythons, tandis que les buffles, girafes et autres antilopes parcouraient les hautes herbes. Il est très vraisemblable que la plaine de l'Ighazer s’accommode bien de cette description, car très voisine du bassin du lac Tchad et à la même latitude, même si l'ensemble lacustre n'a pas été aussi développé du coté ouest de l'Aïr. C'est donc l'ensemble du Sahara, à cette époque, qui était vert et potentiellement peuplé d'hominidés.

    Vers 6-3 Ma, le climat est toujours humide avec de vastes étendues lacustres, notamment dans le bassin du lac Tchad où l'on trouvera Abel au début du XXIè siècle, un australopithèque de 3,5 Ma qui interroge sur l'origine de l'homme, alors centrée autour du rift oriental de l'Afrique. Les australopithèques sont alors présents dans tout le continent, du Maroc à l'Afrique du Sud (Brunet 1995). Avec les dernières découvertes, l’origine de l’homme - dont le rift oriental de l’Afrique en serait l’épicentre - évolue de plus en plus vers une origine de l’humanité panafricaine, où le Sahara a très certainement pris sa place, puisque offrant des milieux diversifiés avant l’aridification actuelle qui a dû effacer nombre d’artefacts. L’émergence du genre ‘Homo’ en Afrique est estimée s’être produite il y a 2,8 Ma (Caparros 2022).

    Jusque là, le Sahara a été plus humide que sec, mais au début du quaternaire vers 2-3 Ma, le pôle nord se refroidit et repousse les déserts sur le nord de l'Afrique. Cette période du quaternaire, le pléistocène, peut être confondue avec le paléolithique, époque de l'éclosion de l'homme moderne du genre ‘homo’, dont ‘sapiens’ il y a 300 ka, nomade chasseur et cueilleur.


    Le Pléistocène

    1995 dupont leroyLes massifs les plus élevés du Sahara central, en particulier de l’Aïr qui ont été érigés sur un socle pour l’essentiel granitique, atteignent et dépassent localement 2000 mètres d’altitude sur les monts Bagzan ou Tamgak). Ils sont essentiellement la conséquence de phénomènes volcaniques récents, dont les périodes de fortes activités se situent au Miocène-Pliocène (Rognon 1994). Cette orogenèse est donc en partie contemporaine des premières phases d’aridification du Sahara.

    L’aridification du Sahara ne serait vraiment apparue qu’au Pliocène, il y a environ 3 Ma, parallèlement au début de la glaciation du Quaternaire dans l’hémisphère Nord. Vers 2,6 Ma, l’accroissement de la variabilité climatique globale du système terre s’explique par la variation complexe des paramètres liés au changement d'inclinaison de l'axe de la Terre. Depuis plus de 2 Ma, les conditions humides qui ont affecté à plusieurs reprises le Sahara sont la conséquence de ces variations orbitales d’insolation (Médail et Quézel 2022).

    Le Pléistocène est découpé en 4 étages, le Gélasien, le Calabrien, le Pléistocène moyen et le Pléistocène supérieur. Le Gélasien a débuté il y a environ 2,6 Ma et le Calabrien s’est clos vers 781 000 ans. A cette suite, débute le Pléistocène moyen qui se clôt vers 150 ka environ. Le pléistocène supérieur s’éteindra lors du Dryas récent pour laisser place à l’Holocène et voir émerger le développement des civilisations néolithiques.

    Durant toute cette période, la limite entre Sahel et Sahara, où se trouve actuellement notre plaine argileuse, a beaucoup fluctué tant vers le nord que vers le sud. En 1995, Dupont et Leroy nous propose une représentation de cette fluctuation qui varie en latitude entre 25° et 12° nord, soit sur plus de 1000 km. Aux stades isotopiques 8 à 15 (300-600 ka), cette limite est, soit au même niveau que l’actuelle, soit plus au nord, témoignant ainsi de conditions climatiques certainement plus favorables en Ighazer. Deux fortes périodes de recul de ces conditions climatiques apparaissent néanmoins, vers 420-440 ka et 330-340 ka, qui voient le désert progresser jusque vers le plateau de Jos au Nigeria. A partir de 350 ka, la limite Sahara-Sahel est le plus souvent en dessous de la limite actuelle, avec trois dégradations importantes vers 180 ka, 140 ka et 110 ka, qui sont identiques au désert Ogolien de la fin du Pléistocène. Durant cette période, un seul haut niveau est observé vers 125 ka et un autre qui correspond à la période humide qui marque les débuts de l’Holocène, la limite Sahara-Sahel se retrouvant vers 23° nord de latitude : c’est comme si notre plaine de l’Ighazer se situait 500 km plus au sud en zone soudanaise (Dupont et Leroy 1995).


    Le Pléistocène supérieur

    climat pleistocèneVers 150 ka, les conditions climatiques sont plus froides qu’actuellement mais, vers 130 ka, une phase plus humide étend les forêts tropicales et couvre de végétation les déserts d’Afrique du nord, dont l’optimum se situe vers 125-120 ka, c’est l’interglaciaire Eémien (Mutri 2014), au début du stade isotopique 5 qui semble d’égal intensité à la période humide des débuts de l’Holocène. Durant cette phase lacustre, la plus intense survenue au Pléistocène supérieur, c’est-à-dire lors de la période la plus chaude du dernier interglaciaire, on estime que les précipitations annuelles atteignaient environ 500 mm. Ces précipitations étaient très probablement alimentées par celles du sud de la Méditerranée qui ont atteint très certainement les 27° de latitude nord. Des observations récentes confirment l'existence de cette phase lacustre dans tout le Sahara. Au nord du Mali, à Sbeita, des sites d’outillages lithiques moustério-levalloisiens sont associés à ces formations du stade isotopique 5. Ces données, ainsi que des preuves polliniques dans les sédiments marins, correspondent aux modèles d’une extension maximale de la forêt tropicale vers 125 ka, ce qui peut corroborer l'arrivée fréquente de dépressions tropicales jusqu'à 27° de latitude nord (Petit-Maire 1989). A cette époque, le Sahara vert est donc très certainement arrosé par les pluies méditerranéennes du nord et les pluies tropicales du sud couvrant ainsi presque l'ensemble du Sahara actuel.

    La période allant de 110 ka à 90 ka, voit le climat se refroidir et s’assécher de nouveau. L’enregistrement de la formation de dunes dans le sud-ouest de l’Afrique indique qu’au moins une partie de cette phase était extrêmement aride. Une phase de froid intense semble culminer vers 70 ka, les conditions de végétation pouvant être les mêmes que celles du désert Ogolien postérieur qui marquera le maximum glaciaire (Mutri 2014).

    De 57 ka à 24 ka, cette période se caractérise par un climat instable qui pouvait fluctuer sur des laps de temps de quelques milliers d’années et devait donc enclencher beaucoup de mouvements de population au grès de la disponibilité des ressources de la chasse, de la cueillette ou de la pêche. Deux épisodes humides sont enregistrés partout au Sahara, vers 45-40 ka puis 35-24 ka, faisant apparaître de petits marécages et lacs peu profonds, entrecoupant une phase semi-aride (Yan et Petit-Maire 1994 ; Caparros 2022). Peu avant le maximum glaciaire, vers 22 ka, le climat semble donc avoir été nettement plus humide que maintenant (Mutri 2014).


    Le désert Ogolien

    sahara ogolien rognon Le Pléistocène est encore assez humide vers 22 ka mais mal connu, avec de grands mammifères et des mollusques autour de grands lacs qui s'assèchent en quelques millénaires, il y a 18 ka, marquant ainsi le dernier maximum glaciaire de sa forte aridité. Le Sahara s'étend rapidement jusque vers le Nigeria et le plateau de Jos, les fleuves Sénégal et Niger se perdant alors dans les dunes. Le désert régresse au nord du continent africain et s’agrandit au sud : c'est le désert Ogolien ou Kanémien pour le bassin du Lac Tchad. L'isohyète des pluies de 100 mm se situe alors à 13-14° de latitude et les précipitations sont environ 50 % inférieures aux valeurs actuelles (Petit-Maire 1989).

    Cette période 22-15 ka n'est néanmoins pas uniforme dans toute la région, ce qui a peut-être permis à quelques groupes humains de subsister, notamment dans les montagnes du Sahara central dont l'Aïr. Pour preuve, de puissants dépôts lacustres de diatomites se sont formés durant cette période, notamment dans les cratères du Tibesti (Médail et Quézel 2022).

    Particulièrement au Sahara méridional, à la fois les données stratigraphiques et les datations mettent en évidence de profondes modifications environnementales, mais avec de nettes disparités régionales. Si l’on dénombre huit phases humides au Sahara méridional, la situation est loin d’être comparable et synchrone au Sahara septentrional ou oriental, ainsi que sur les massifs montagneux, offrant de fait aux populations en place des possibilités de migration à assez courte distance dans des espaces refuges comme en altitude.

    Les anciennes dunes, sous les sables vifs du Sahara ou sous la savane sahélienne, peuvent être datées par la méthode de luminescence des quartz. Elles se sont formées durant la phase du désert Ogolien entre 21-15 ka avant nos jours (Petit-Maire 2021). Le Sahara s’étendait donc alors au moins 500 km plus au sud qu’actuellement. Le grand humide Holocène qui suivra permettra alors à la végétation de fixer ces dunes qui parsèment l’Azawagh et la Tadarast. La plaine de l’Ighazer ne possède aucune de ces dunes comme si elle avait été nettoyée du sable éolien, mettant à nu les argiles de l’Ighazer. Plusieurs hypothèses peuvent expliquer cela et sans doute même se cumulent-elles. En premier lieu, les montagnes de l’Aïr arrêtent et détournent à l’est les vents alizés empêchant leur accumulation en Ighazer. Ensuite, une plaine qui, même si elle semble à une altitude identique aujourd’hui, a pu être surélevée par rapport à l’Azawagh. Celui-ci aurait alors servi d’exutoire pour les sables lessivés par le grand humide Holocène.


    Le younger Dryas

    A la suite de ce Sahara hyper aride, une augmentation des précipitations débute et fait apparaître au sud une courte période humide de 15-14 ka. Le Dryas correspond à ces courtes périodes intervenues à la fin de l’ère glaciaire, dont la spécificité est de connaître de brusques changements climatiques. Le Dryas ancien d’abord, qui aurait duré trois siècles seulement. Puis le Dryas récent ou Younger Dryas, s’est installé durant le période 13-12 ka. Il marque un refroidissement intervenu très brutalement qui s’est traduit par une phase aride en Afrique du nord (Mutri 2014).

    A cette brutalité climatique, semble répondre une brusque augmentation du niveau de la mer de notre planète de plus de 120 mètres. Des théories récentes suggèrent que cette brutalité est liée à un ou plusieurs impacts cosmiques qui auraient heurté notre planète et ainsi fait fondre la calotte glaciaire, provoquant ainsi l’épisode climatique du Younger Dryas, l’extinction de la mégafaune du Pléistocène comme les mammouths, ou encore la disparition de civilisations comme celle de Clovis en Amérique du nord.

    L’humidification du Sahara au cours de l’Holocène résulte du déplacement vers le nord de la zone de convergence intertropicale, de l’instabilité glaciaire/interglaciaire dans les latitudes septentrionales, des changements d’insolation et des variations des conditions atmosphériques dans l’Atlantique Ouest (Caparros 2022). Entre 15 000 et 7000 avant le présent, le régime des pluies est fait de fines gouttes inférieures à 2 mm, la végétation est de type steppique en Aïr, tandis qu’après 7000 et jusqu’à il y a 4000 ans, ont dominé des pluies à grosses gouttes supérieures à 2 mm, engendrées comme actuellement par les cumulonimbus des dépressions mobiles, matérialisant le régime de la mousson estivale (Maley 1983), et proposant ainsi un milieu de savane ou steppe boisée. L’intensité et la direction de la mousson sont annuellement influencées en grande partie par les différences de température et de pression atmosphérique du continent et de l’océan.


    L’optimum humide Holocène

    Actuellement les précipitations en zone saharienne sont de 20 millimètres par an. La période chaude qui s’amorce vers 12 ka, au début de l'Holocène qui peut correspondre au néolithique, va voir passer ces dernières à 400 millimètres par an en plein Sahara (Yan et Petit-Maire 1994). Le changement du rapport précipitation sur évaporation induit des lacs saisonniers ou des marécages dans les dépressions topographiques. C’est le grand humide de l’Holocène dont l’optimum se situe vers 8500-6500 BP, apogée du méga Tchad.

    On y observe d'abord un rapide recul du désert, sous l'influence du réchauffement des eaux du golfe de Guinée. Une faune aquatique et lacustre ainsi que de grands mammifères se développent jusque vers le pied du Hoggar. Entre la Tamesna et la plaine de l'Ighazer s'étendait un grand lac, recevant tour à tour les déversements du Timersoï et de l'Ighazer. Ce lac de faible profondeur se reforme peut être chaque année, puisque les deux affluents se rejoignent vers In Abangarit pour former la vallée de l’Azawagh. Pour ainsi dire, le début de cette vallée forme un peu l’exutoire des deux massifs sahariens et fonctionne comme la bouche d’évacuation d‘une baignoire, qui se remplit plus vite qu’elle ne se vide. Ce lac a pu aussi fonctionner en Ighazer comme un delta intérieur, probablement difficile d’accès une grande partie de l’année, des lacs d'eau douce plus ou moins permanents et des marécages étendus se formant. La large extension des eaux de surface est frappante durant cet optimum, les sols bruns témoignent d'un couvert herbacé.

    Alors que vers 20 ka, durant le maximum glaciaire en période hyper aride du Sahara, la zone de convergence intertropicale était positionnée sur 13-14° de latitude nord, à l’optimum pluvial vers 8000 BP, celle-ci remonte vers le nord à 22-23° de latitude nord, soit une migration sud-nord d’environ 1000 km entre le dernier maximum glaciaire et l’optimum du grand humide Holocène (Yan et Petit-Maire 1994 ; Caparros 2022).


    Vers l’aridification actuelle

    Cette période très humide est suivie par un changement marqué de moindre humidité et de baisse des températures à partir 6700 BP. Des épisodes de sécheresse ou de salinisation, dans la cuvette de Taoudenni par exemple (Petit-Maire 2021), sont enregistrés dans les séries lacustres. Ce court épisode est largement enregistré au Sahel et au sud du Sahara à des dates variant selon la latitude et la situation géographique. Il dure environ 1000 ans et est suivi d'un second épisode moins humide. Progressivement, les espèces végétales et animales sahéliennes disparaissent de la ceinture tropicale (Yan et Petit-Maire 1994).

    Un autre épisode intense, mais plus bref qui débute vers 5000 BP au sud du Sahara, a occasionné une phase très aride entre 4200 et 4000 BP qui interrompt toute sédimentation lacustre. L’assèchement est alors rapide et définitif dans de nombreux secteurs, conduisant à la disparition des grands lacs du Sahara centro-méridional. Le climat progresse alors à partir de 4000 BP vers un Sahara aride qui persiste jusqu’à nos jours.
    Vers 3000 BP, la limite nord du Sahel atteint progressivement sa position actuelle à 17°N. Cette évolution climatique d'une zone couvrant quelque 6,5 millions de km2 est étonnamment similaire à celle enregistrée dans la péninsule arabique et en Asie (Yan et Petit-Maire 1994).


    La présence humaine

    L'homme menait une vie sédentaire dans cette région 7000 ans avant notre ère, comme le prouvent les études paléoéthnologiques de Dutour (1986). Ces populations ont été étonnamment reconnues comme des Cromagnoïques, qui n'étaient auparavant connus qu'au Pléistocène supérieur du Maghreb et de la Nubie et à l'Holocène inférieur du sud du Maroc. Cela montre la possibilité d'une migration à travers le Sahara à la fin de la phase aride dans le nord du Sahara, vers 9 300 BP.

    Au court du Néolithique, l'homme commence donc à se sédentariser en maîtrisant de plus en plus son environnement, notamment grâce à l'élevage. Une faune d'eau douce est abondante. Le Crocodylus niloticus a atteint la région ainsi que de grands mammifères de savane : hippopotame, rhinocéros et six espèces de grandes antilopes. Les hommes du Néolithique vivaient dans toute cette région selon une économie de chasseurs-cueilleurs.

    C'est à partir de cette époque néolithique que l'homme va réoccuper le plus sûrement la plaine de l'Ighazer, notamment le long de la vallée de l'Ighazer wan Agadez et du Timersoï, ainsi que celle de I'Azawagh. Cette période favorable, entrecoupée de quelques épisodes plus arides, va perdurer jusque vers 4 000 BP, où le Sahara va connaître l'évolution vers son climat actuel et voit l'homme utiliser des outillages de plus en plus complexes et diversifiés, ériger des monuments funéraires et se structurer socialement, marquant ainsi une évolution sociétale majeure. C’est cette évolution sociale qui permettra à l’homme d’occuper même les milieux les plus arides et d‘adapter son mode de vie aux disponibilités qu’offre son environnement.

     

     


    Références

    Aumassip G. 2004 – Préhistoire du Sahara et de ses abords : Tome 1, Au temps des chasseurs : Le Paléolithique, Maisonneuves et Larose, 382 p.
    Brunet M. 1995 – Les australopithèques : à l’ouest... du nouveau en Afrique, Bulletins et Mémoires de la Société d’Anthropologie de Paris, 7 (3), p. 177‑179.
    Brunet M., Bocherens H., Denys C. 2002 – A new hominid from the Upper Miocene of Chad, Central Africa, Nature, p. 145‑151.
    Caparros M. 2022 – Le rôle du Sahara dans l’évolution humaine en périodes humides, lorsqu’il n’était pas un désert, in Les sociétés humaines face aux changements climatiques, ArcheoPress Publishing LTD, volume. 22, p. 187‑221.
    Dupont L., Leroy S. 1995 – Steps toward drier climatic conditions in north-western Africa during the Upper Pliocene, in Palaeoclimate and evolution, with emphasis on human origins, Yale Univ. Press, p. 547.
    Maley J. 1983 – Histoire de la végétation et du climat de l’Afrique nord-tropicale au Quaternaire récent, Bothalia, 14 (3‑4), p. 377‑389.
    Médail F., Quézel P. 2022 – Changements environnementaux passés et conséquences sur la flore actuelle, Marseille, Référence, Marseille, IRD Éditions, p. 161‑185.
    Mutri G. 2014 – « North and Saharan Africa geography and chronology » in « Encyclopedia of Global Archaeology », , Springer, p. 5435‑5453.
    Nantet B. 1998 – L’invention du désert : archéologie du Sahara, Payot, 381 p.
    Petit-Maire N. 1989 – Interglacial Environments in Presently Hyperarid Sahara : Palaeoclimatic Implications, NATO ASI Series, 282, p. 637‑661.
    Petit-Maire N. 2021 – Sahara : Les grands changements climatiques naturels, réédition Errance, 192 p.
    Rognon P. 1985 – Désert et désertification, Total Information, (100), p. 4‑10.
    Rognon P. 1994 – Biographie d’un désert - Le Sahara, L’Harmattan, 350 p.
    Yan Z., Petit-Maire N. 1994 – The last 140 ka in the Afro-Asian arid/semi-arid transitional zone, Palaeogeography, Palaeoclimatology, Palaeoecology, 110 (3‑4), p. 217.


    Les dinosaures de l'Ighazer

    jobaria

    afrovenator

    suchomimus

    ouranosaurus

    nigersaurus

    sarcosuchus

    nigerpeton

    saharastega

    jobaria afrovenator suchomimus ouranosaurus ouranosaurus ouranosaurus
    Jobaria tiguidensis
    Afrovenator abakensis
    Suchomimus tenerensis
    Ouranosaurus nigeriensis
    Nigersaurus taqueti
    Sarcosuchus imperator
    Nigerpeton ricqlesi
    Saharastega moradiensis
    Carcharodontosaurus saharicus
    Baharijasaurus ingens
    Elaphrosaurus iguidiensis
    Aegyptosaurus baharijensis
    Eocarcharia dinops
    Kryptops palaios