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    La croix d'Agadez - Teneghelt

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    extrait du livre Bijoux Touareg - Jean Burner

    La teneghelt est un bijou très particulier dans la tradition des Touaregs de l'Aïr et de l'Azawagh du Niger. Parmi les bijoux connus aujourd'hui, c'est l'un des plus anciens. Il a reçu son nom en raison de sa technique de fabrication très différente de celle des autres bijoux : il est coulé soit sur un moule en métal, soit, et cette technique était la plus fréquente autrefois, sur une matrice taillée dans la cire et insérée dans un moule en argile (technique dite de la « cire perdue »).

    C'est de cette technique que lui est venu le nom : teneghelt désigne l'action de verser (du verbe enghel ou anghel : verser), de couler dans le moule.

    Le premier bijou, et pendant de nombreuses années le seul, à être appelé ainsi et qui a gardé son nom jusqu'à aujourd'hui, est la teneghelt ta n Agadez, depuis toujours dénommée par les européens « croix d'Agadez ». Cette appellation est arbitraire : elle n'a pas d'équivalence en langue tamajaq, la langue des touaregs de l'Azawagh et de l'Aïr.

    L'origine de la croix d'Agadez n'est pas connue. Mais de nombreuses hypothèses ont été formulées et publiées, les unes plus belles et plus troublantes que les autres ; elles ont peut-être contribué à lui donner le statut d'un bijou hors norme connu dans le monde entier...

    Voici quelques-unes des diverses explications données sur son origine :

    Deux explications ont été données suite à des travaux conduits en 1914 et au début des années 1920 :

    - il y aurait un lien avec un bijou appelé Talhakimt dont la croix d'Agadez se serait inspirée et qui était originaire des Indes où il était la représentation stylisée des deux sexes ;

    - il pourrait y avoir une relation avec le signe pharaonique « ANKH » qui représente, dans l'Égypte ancienne, une croix qui symbolise la vie ; il précise que l'Ankh égyptien « est un symbole composé : l'organe mâle et l'organe féminin ; comme symbole de la vie il doit évidemment représenter les deux » ; il fait aussi une autre relation avec le signe de « TANIT » qui représentait une déesse lunaire, principale divinité de Carthage.

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    Une autre hypothèse a été faite : la croix d'Agadez étant un bijou du sud du pays touareg, aux confins du monde noir, elle pourrait dériver de la représentation du varan, reptile africain aux vertus prophylactiques.

    Pour deux auteurs, la croix d'Agadez représenterait à la fois :

    - le sexe masculin,

    - le pommeau de la selle de chameau,

    - les 4 directions cardinales.

    Cette croix serait donnée par le père à son fils à l'époque de la puberté.

    Une origine souvent citée et que reprennent encore aujourd'hui certains vieux forgerons : la croix d'Agadez représenterait la « croix du Sud », étoile qui guide le caravanier du désert vers Agadez qui est la ville la plus au sud du Sahara. Une observation sur le terrain permet de constater qu'au nord d'Agadez, dans le massif de l'Aïr et le désert appelé Ténéré, la « Croix du Sud » n'est visible, juste au-dessus de l'horizon, que quelques mois par an.

    Pour d'autres la croix d'Agadez traduit la lettre « + », signe orthographique du féminin en tifinagh, (écriture des touaregs) et pensent que ce bijou serait ainsi un « hommage aux vertus de la Femme »...

    Enfin, une belle légende est parfois citée : « Une belle princesse était courtisée par un jeune guerrier qu'elle aimait ; ne pouvant la rencontrer, il demanda à un forgeron de faire un bijou qui exprime son amour ; celui ci fit une bague avec les lettres en tifinagh, alphabet des touaregs : t (« t ») et r (« r »), ce qui veut dire « tara » (« amour ») ; quand le roi accepta le mariage, ils décidèrent de faire de la bague un pendentif ; le forgeron la modifia en ajoutant la lettre k (« k ») ce qui donne trk « terak » ce qui signifie proximité, cohabitation, mariage et qui a donné la forme de la croix d'Agadez ».